La grande majorité des ventes de biens immobiliers se réalise grâce à l’octroi d’un prêt par une banque au profit de l’acquéreur. Dans cette situation, le compromis préalable à l’acte authentique (notarié) de vente devra être signé sous condition suspensive de l’obtention d’un prêt. Cette condition suspensive a pour but de permettre à l’acquéreur de se libérer de ses obligations et de ne pas acquérir dans l’hypothèse où la banque refuse de lui prêter les liquidités nécessaires.
Il arrive cependant que l’acquéreur, déjà propriétaire de son logement, désir revendre ce dernier pour financer sa nouvelle acquisition. L’articulation dans le temps de la vente du précédent logement et de l’acquisition du nouveau est toujours complexe et doit être réfléchie en amont.
Trois solutions s’offrent à l’acquéreur :
- la solution la plus simple et la plus sûre pour l’acquéreur est de vendre au préalable son logement pour ensuite acheter. Toutefois, les deux ventes se font rarement simultanément et il ne sera pas rare pour l’acquéreur de devoir louer un logement entre la vente puis l’acquisition.
- La deuxième solution est de demander à la banque un crédit-relais permettant à l’acquéreur d’avoir en quelque sorte une avance pour financer tout de suite le nouveau logement. Cette avance sera remboursée à la banque une fois que l’acquéreur aura vendu son logement initial (avec des intérêts). Cette solution reste dangereuse, notamment lorsque l’acquéreur ne parvient pas à vendre son premier logement dans les délais autorisés par la banque. Le crédit-relais peut alors devenir très onéreux. Cette situation a été très souvent rencontrée lors de la crise de 2007-2008. Depuis, les banques sont plus réticentes à consentir ces crédit-relais.
- la dernière solution est de signer pour l’acquisition du nouveau logement un compromis de vente sous condition suspensive de la vente du logement de l’acquéreur.
La condition suspensive de la vente d’un bien immobilier appartenant à l’acquéreur permet de soumettre la vente à une condition qui déterminera sa réalisation définitive ou sa non-réalisation. Avec le compromis, le vendeur et l’acquéreur se mettent d’accord sur la chose et le prix ainsi que sur les éléments essentiels de la vente. Toutefois, cette vente se réalisera effectivement par la signature d’un acte authentique chez le Notaire seulement dans l’hypothèse où l’acquéreur aura vendu son propre bien. Dans l’hypothèse inverse le compromis sera caduc et la vente n’aura pas lieu.
La notion de condition
La « condition » est définie juridiquement comme un événement futur mais incertain, auquel est subordonnée l'exécution d’une obligation. La notion de condition est à distinguer de celle de terme, qui correspond à un événement futur mais certain dont dépend l'exigibilité ou l'extinction de l'obligation. La qualification de la condition repose donc, contrairement au terme, sur l’incertitude de l'évènement.
La réalisation de l’événement qui caractérise la condition ne doit pas dépendre exclusivement de la volonté d’une des parties au contrat. Ces conditions sont appelées potestatives et sont considérées comme nulles.
Ainsi dans notre hypothèse, intégrée dans le compromis une clause selon laquelle la vente est soumise à la condition suspensive de la vente d’un autre bien, sans aucune autre précision, serait considérée comme potestative et donc nulle. Rien n’oblige réellement l’acquéreur à vendre son bien. La vente dépendra de son bon vouloir. (Passé le délai de rétractation, il pourra toujours se libérer de son obligation d’acheter en mettant en vente son bien à un prix exorbitant). Il est donc nécessaire d’encadrer la condition suspensive de la vente d’un autre bien.
Une condition encadrée
La condition suspensive de la vente d’un autre bien doit être encadrée pour être valable. Elle ne doit pas dépendre de l’arbitraire de l’acquéreur.
Pour cela, il faut déterminer le prix de vente (ou tout du moins une fourchette de prix ) du bien appartenant à l’acquéreur et prévoir une durée maximum pour la réalisation de cette vente.
De plus, il est nécessaire de vérifier que l’acquéreur ait fait au préalable les démarches nécessaires pour vendre son logement. La cour de cassation valide cette condition lorsque l’acquéreur a fait appel à un tiers pour vendre son logement, c’est notamment le cas lorsque le bien a été mis en vente auprès d’une agence immobilière.
De même, cette condition est valide lorsque l’acquéreur a déjà signé un compromis pour la vente de son logement. Dans cette situation, la condition suspensive permettra à l’acquéreur de pouvoir se libérer de la vente si ses propres acquéreurs n’ont au final pas leur prêt pour acheter.
Ainsi, il est tout à fait possible d’insérer une condition suspensive de vente d’un autre bien dans un compromis de vente du moment que cette clause est encadrée.
Cependant, dans les faits une telle clause est très aléatoire et très risquée pour le vendeur. Il verra son bien bloqué pendant plusieurs mois, le temps que l’acquéreur trouve lui-même un acquéreur pour son logement. Si le délai prévu pour la réalisation de la condition est écoulé sans réussite, le vendeur se retrouvera au point de départ et aura certainement laissé passer d’autres potentiels acquéreurs.
C’est pourquoi, même si la cour de cassation valide cette clause lorsque l’acquéreur a mis son bien en vente dans une agence immobilière, en pratique on conseillera cette clause seulement lorsque l’acquéreur a déjà signé un compromis de vente pour son propre bien.